Quelle place pour les médias dans notre système politique ? | Arnaud Mercier
Conférencier : Arnaud Mercier, Professeur des Universités Paris II Panthéon-Assas Conférence filmée à la Médiathèque Marguerite Duras, Paris, le 24/11/2018
Dans l’intro M.Mercier annonce qu’il faudrait 30 heures pour traiter le sujet. Il manque effectivement 29 heures parce que là, c’est plutôt pauvre. Trois points fondamentaux sont évacués rapidement alors qu’ils déterminent justement la nature des critiques globales qui s’appliquent aux médias.
1 – Le mode de consommation des médias.
2 – Le mode de production de l’information.
3 – Les classes sociales et les intérêts propres qu’elles partagent entre elles ou qui les opposent.
1 – Dire que l’on ne peut mettre les médias dans le même sac car ils sont très divergent c’est nier les différences dans l’accès aux médias par chaque citoyens. Comme le dit M.Mercier, si on cherche une orientation particulière on la trouvera. Mais la question est, qui cherche et quelle est la proportion des citoyens qui cherche ? Si une grande majorité de citoyens se contente de consommer les médias les plus facilement accessibles alors ils se limiteront à la télévision, aux radios nationales et aux journaux gratuits distribués dans les transports publics.
De ce fait, une catégorie de média se dessine, ceux que l’on pourrait appeler “les grands médias” ou “médias dominants”. Or, c’est bien cette catégorie qui est visée par les militants quels que soient leurs bords. Ils n’englobent pas dans ce terme les médias plus confidentiels qui portent leurs idées. Un militant très à droite ne considère pas Russia Today dans ce terme qu’il utilise, un militant La France Insoumise ne considèrera pas Le Média, car ils perçoivent ces médias comme confidentiels par rapport aux chaînes télévisés, aux grandes radios nationales et aux grands quotidiens de la presse. Ne pas prendre en compte cet aspect pour crier à l’accusation sans fondement est très contestable.
Il y a bien un terme “Les médias” qu’il faut entendre comme “Les médias dominants” tels que définis plus haut par leurs spectateurs, auditeurs, lecteurs.
2 – Si l’on continue avec la définition “Médias dominants”, alors il est clairement perceptible que le modèle économique et les contraintes liées vont influencer considérablement le mode de production des informations. Ce mode de production influencera lui-même la sélection des informations qui seront diffusées et celles qui ne le seront pas. Pour revenir sur l’exemple de Fillon, les médias dominants ont bien repris l’information mais elle émanait d’un média alternatif qui avait fait l’effort d’une enquête.
Les médias dominants sont plus devenus, du fait de leur fonctionnement, des caisses de résonance que des sources d’information. La conséquence première de cet état de fait est qu’il est donc parfaitement légitime d’associer les grands médias entre eux, au moins sur ce point. Une critique globale est donc possible, non pas sur une collusion suspecte et délibérée, mais sur une convergence de sujets et de points de vue qui résultent d’un fonctionnement structurel identique.
3 – Qui dit médias dominants dit têtes d’affiche. Il y a de grands journalistes comme il y a de grands média. C’est à dire des journalistes universellement connus dont la parole est audible par tous. Or, la classe sociale de ces “grands bourgeois de l’info”, aussi bien porte parole (présentateurs, chroniqueurs et spécialistes) que directeurs des services d’information, est la même que celles de la majorité des hommes et femmes politiques. Ils proviennent du même milieu, ont à peu près les mêmes revenus et les mêmes activités extraprofessionnelles. Ils évoluent dans les mêmes cercles et partagent les mêmes intérêts économiques et sociaux.
Comme pour le point 2, ce n’est pas tant une convergence consciente qui a lieu qu’un mouvement général dans la même direction guidé par une éducation et une culture partagée au sein d’une même classe sociale. Ce sont ces points, trop rapidement négligés, qui provoquent la concentration des critiques vers un groupe de médias spécifiques.
Ne pas vouloir analyser dans le détail les différentes strates des médias au sens générique pour séparer les médias dominants et les médias secondaires ou alternatifs ne permet d’aboutir à aucune conclusion. C’est ce qui explique à mon sens la vacuité de cette intervention qui se contente de démonter un homme de paille composé d’un mot gloubi-boulga en citant ensuite des différences qui ne sont pas pertinentes pour évoquer la critique globale des médias dominants. (commentaire George PIVOINE)