Le parquet européen brade la justice française
Le 8 décembre 2020, le député Ugo Bernalicis défend une motion de rejet Projet de loi relatif au Parquet européen et à la justice pénale spécialisée en séance publique de l’Assemblée nationale. Le Député rappelle qu’il y a une lutte au sein de l’Europe concernant le référentiel juridique, entre la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne en 2000 et la convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales. Ce projet de loi est une étape supplémentaire dans l’ancrage de l’Union européenne au détriment de la vision droit-de-l’hommisme portée par la CEDH.
Pour le groupe parlementaire de la France insoumise, la CEDH doit être la référence et non l’UE, qui fait primer les 4 libertés fondatrices sur le reste (et donc le fondamental). Ceci étant dit, ce projet de loi qui décline un règlement de l’UE (donc déjà applicable) marque une ingérence du droit de l’Union européenne dans le système juridique français. Il vient préfigurer de manière inquiétante une conception d’un parquet européen sans garantie d’indépendance, sans juge d’instruction et au détriment des parties civiles. Le député dénonce le comportement du Gouvernement qui renonce encore une fois de réformer le statut du parquet en France ! Alors que ce texte préfigure un nouveau parquet, cela revient à laisser à l’Union européenne le soin de décider. Nous ne pouvons être naïfs en la matière, le droit de l’Union européenne a toujours fonctionné ainsi par intégration c’est ce qu’on appelle la méthode fonctionnaliste du droit de l’Union européenne. Ce parquet européen porte un nouveau coup à la justice française et singulièrement contre le juge d’instruction français.
Cet OJNI (object juridique non identifié) entend lutter contre une partie de la délinquance financière et la délinquance environnementale dès lors qu’elle touche aux intérêts de l’Union européenne. Le groupe de la France insoumise y voit un recul de l’effectivité de la lutte contre ces deux délinquances. Le député pointe des incohérences non résolues sur ce parquet européen : son indépendance est proclamée, mais pas garantie. En effet, le statut de détachement maintien une dépendance à l’égard de l’autorité d’accueil tout au long de la période de détachement et questionne sur le retour du magistrat dans son administration d’origine. Le rôle de l’organe hiérarchique, ce « bureau central », ne présente pas les garanties suffisantes pour assurer l’indépendance de ce parquet. En l’état, nous craignons de voir ici un pouvoir hiérarchique qui fera peser les mêmes difficultés et jettera la suspicion de non-indépendance : possibilité de réattribution d’affaire, orientation des décisions d’actes d’enquêtes, … Son articulation avec les instances françaises n’est pas satisfaisante.
Le champ de compétence de ce parquet européen fait peser un risque de conflit de compétence avec nombre de juridictions français au 1er titre duquel le PNF et les JIRS. Si ces conflits de compétences se résolvent lorsqu’on se situe dans un environnement national ( et encore ca reste compliqué compte tenu du manque de moyens de la justice française), il est difficilement envisageable d’avoir des perspectives rassurantes avec un parquet européen rattaché à l’Union européenne… Ce risque doit satisfaire les futurs mis en cause qui pourront démultiplier les exceptions de compétence. Pour notre groupe parlementaire, il faut pour lutter contre la délinquance financière renforcé l’échelon national qui est au plus près des victimes et disposent de moyens d’enquête qu’il peut contrôler et diriger et renforcer la coopération internationale. Sur la question environnementale et des juridictions spécialisées, le projet de loi ne répond pas au manque de moyens d’enquête et nous apporterons pour la séance des propositions sur ce point. En l’état, l’étude d’impact montre que ce qui est proposé ne répond pas à un besoin et voir prend le risque de superposer de nouvelles juridictions au risque de démultiplier les conflits de juridictions.
Les débats, nous permettrons d’approfondir notre positionnement. L’introduction d’une CJIP environnementale décriminalise les délinquants environnementaux, sans s’interroger sur le développement de mécanisme de recueil des signalements d’atteinte à l’environnement à l’autorité judiciaire. Ce texte fragilise l’action de l’État Français se désaississant au profit d’une juridiction européenne, dont il est certain que l’idéologie libérale ne permettra pas de garantir une justice environnementale.