Gilets jaunes : “La volonté d’empêcher de manifester a toujours été là”
26 Avril 2019 – Arrêt sur images – Dernière loi dans l’arsenal qui régit le droit de manifester : la loi “anti-casseurs”, promulguée le 11 avril dernier (on vous en parlait ici). Parmi les articles controversés -article entretemps censuré par le Conseil constitutionnel : la possibilité pour les préfets de prononcer des interdictions de manifester. Subsistent d’autres articles problématiques : la possibilité d’effectuer des fouilles et contrôles d’identité aux abords des manifestations. “Ça n’existait pas avant, même si on le faisait quand même, c’est ce qu’on appelait les interpellations préventives
“, rappelle Arié Alimi. Un procédé “illégal
“, pour l’avocat, avant la loi “anti-casseurs”. Le but ? Empêcher les Gilets jaunes d’assister à la manifestation, par les gardes à vue.
Autre disposition “problématique
” : la dissimulation totale ou partielle du visage “sans motif légitime
“. Des motifs non définis, explique Alimi. “Le problème c’est : vouloir rester dans une manifestation est-il légitime ou pas ? Aujourd’hui les juridictions considèrent qu’à partir du moment où il y a des gaz [lacrymogènes], vous devez quitter la manifestation
“.
“La volonté d’empêcher de manifester a toujours été là
“, ajoute Vanessa Codaccioni. Exemple avec le Général de Gaulle, qui lors de mai 68, avait “décidé de dissoudre une dizaine d’organisations d’extrême gauche
“, rappelle l’historienne. Pour la loi anti-casseurs, il y a le précédent de la loi de 1978, “qui visait au départ les militants maoïstes
“. Une loi qui “très rapidement s’est attaquée à des agriculteurs, à des paysans, à des militants
“. Un loi abrogée par François Mitterrand.
Retour en 2015 : l’état d’urgence est déclaré après les attentats du Bataclan. Parmi les dispositions policières désormais possibles : les assignations à résidence sur demande du préfet. Qui seront bien vite utilisées contre, notamment, des militants écologistes lors de la COP21. “On voit très bien quelque chose de plus général, l’application de la logique antiterroriste à la gestion du militantisme
“, note l’historienne. Un fait “qui a toujours un peu existé
” : exemple avec la loi de dissolution de 1936, votée par le Front populaire pour dissoudre les ligues d’extrême droite… et qui servira en 1939 à dissoudre le parti communiste. En 1963, le Général de Gaulle crée la Cour de sûreté de l’Etat pour juger l’OAS… juridiction qui jugera des militants de mai 68, des indépendantistes corses, basques, bretons. “Une fois qu’un dispositif est là pour une cible officiellement et consensuellement décriée, des djihadistes, il va s’appliquer à d’autres cibles, qui n’étaient officiellement pas dites au départ.
” Pour Codaccioni, “ça s’aggrave
“.
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